Tête en l'air

Richard Gaitet

Paulsen

  • Conseillé par
    17 juin 2018

    Tête en l'air, Richard Gaitet, Paulsen, 2018...,

    Motivé pour être le premier écrivain dans l'espace, projet qu'il explique aux éditrices de Paulsen, Richard Gaitet se voit proposer plutôt d'être le premier à écrire un livre sur le mont Blanc du point de vue d'un novice. Son guide sera René Ghilini, un alpiniste réputé, chasseur de cristaux. C'est l'histoire de la préparation à cette ascension que Richard Gaitet raconte, puis en apothéose, cette fameuse montée jusqu'au sommet.

    Génialement sous-titré par une longue phrase qui résume fond et forme : "Récit authentique et déséquilibré d'une ascension du mont Blanc par un blanc-bec à lunettes inexpérimenté qui, au cours de son voyage, réapprit à marcher.", ce livre est aussi l'occasion pour Richard Gaitet d'en appeler aux écrivains majeurs qui ont écrit sur les grands espaces, la montagne, les voyages, les sensations fortes et aux pionniers de l'alpinisme, à ceux qui ont découvert le mont Blanc et d'autres sommets. Très documenté et très drôle l'histoire de la préparation de ce "sportif proche de zéro, bigleux comme pas deux, finaliste annuel des championnats du monde des empotés, fêtard gourmand doté d'un charmant petit ventre à bière, descendant d'une longue lignée de cardiaques et intello poli du 20e arrondissement de Paris" (p.13)

    Le décor planté, je dois dire que j'ai apprécié ma lecture bien que je sois très loin de la montagne, que je n'y sois allé qu'à de très rares occasions et que l'exploit sportif est aussi loin de moi qu'un saucisson pur porc d'un musulman (très) pratiquant. Ma relation avec le sport est conflictuelle, je ne l'aime pas et il me le rend bien.

    Le plus de ce livre par rapport à tout autre, c'est évidemment le ton, entre le sérieux de la préparation et la fanfaronnade quasi permanente. Et puis un peu de lyrisme dans les descriptions des paysages et dans la fin lorsque l'objectif est atteint, sans doute le manque d'oxygène, le fameux mal des montagnes qui touche le romancier-alpiniste bien qu'il soutienne ne pas en avoir souffert, mais nous à le lire, on le ressent bien, ou alors c'est l'euphorie d'avoir réussi, c'est même sûrement cela, les deux causes ayant les mêmes conséquences.

    C'est aussi une histoire de rencontres, avec René Ghilini et sa femme Petra bien sûr, mais aussi de plus éphémères avec des compagnons d'ascension ou d'entraînement, tous des gens fous de montagne, qui mesurent les risques tout en sachant que parfois, la montagne n'en fait qu'à sa tête, surtout maintenant avec le dérèglement climatique qui gêne les prévisions météorologiques et bouleverse fondamentalement la nature.

    Récit musical aussi, Richard Gaitet met en exergue -entre autres- une phrase tirée d'une chanson d'Alain Bashung, de son excellent et noir album L'imprudence. D'autres groupes et chanteurs sont cités. Personnellement, je n'ai pu me défaire, à chaque fois que je lisais le titre du livre, de la chanson de Jacques Higelin, qui porte le même nom.