Ils ne sont pour rien dans mes larmes

Olivia Rosenthal

Verticales

  • 3 mai 2012

    A lire absolument !

    Les quatorze personnages qui s’expriment en ces pages ont un lien viscéral très fort avec le cinéma, ou à tout le moins, avec un film vu un jour un peu par hasard. Qu’il soit une claque monumentale, un miroir de nos émotions, qu’il offre une réponse à certaines questions et éclaire des zones d’ombre, qu’il densifie la vie, le film évoqué a laissé une marque indélébile chez le personnage qui en parle. Comme s'il s'était adressé directement à eux, par des voies mystérieuses :


    « Les enfants imaginent que leur père a quelque chose à leur dire. Ils imaginent que leur père n’arrive pas à le leur dire. Ils imaginent que le cinéma dira quelque chose à la place de leur père, que chaque film est une grande histoire parlée qui leur est directement adressée. Au lieu de regarder les images, ils écoutent et écoutent encore comme s’ils entendaient enfin la voix de leurs parents. » (p. 29)

    Le texte regorge d'aphorismes, de phrases lumineuses qui sonnent et résonnent en nous, lecteurs et spectateurs :

    « Quand on est habité par l’art cinématographique, on est plus fort que ses échecs, on croit qu’on pourra par sa seule générosité plier le monde à son désir. » (p. 41)

    Olivia Rosenthal évoque dans une scène finale avec humour et sensibilité ses propres réactions devant Les parapluies de Cherbourg :

    « La première fois que je vois ce film

    En compagnie de mon seul et unique amour

    Et d’un couple d’amis

    Je pleure tellement

    Que je n’ose pas me lever

    Ni regarder autour de moi

    Ni parler

    Et que je reste collée à mon fauteuil

    Tête baissée

    En faisant semblant d’être très occupée

    A chercher quelque chose

    Que je n’arrive pas à retrouver.

    (…)

    Avouer qu’on ne cherche pas ses clefs

    Sous les fauteuils d’orchestre du dernier rang

    Mais juste qu’on se cache

    Pour pleurer

    C’est sans doute pénible

    Mais ça a l’avantage

    D’être clair

    Bien qu’à la vérité ça ne permette pas d’élaborer

    Une analyse précise et poussée

    Des raisons pour lesquelles on est à ce point-là

    Affectée. » (p.100)

    Ce que chante Olivia Rosenthal à travers ces personnages n’est pas simplement un hymne au cinéma, mais bien un hommage poignant à la culture, à l’art qui transcende le réel pour mieux le pénétrer et l’imprégner. Cet art influe sur nos vies et dessine des trajectoires dans des destins humains, il est finalement indissociable de la vie même tant les fils qui tissent les fictions et la réalité sont entremêlés…